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Claire Bailly : In-formation et Information dans les processus de création

Informer, c’est délivrer un message ; c’est aussi donner une forme. La création – tout comme la recherche par la création – peut être lue, aujourd’hui plus que jamais, comme étant aux prises avec l’un et avec l’autre. Le numérique, le big data, la dématérialisation, mettent en avant l’information, en véhiculant un univers où la donnée est la particule élémentaire et fondamentale. Ils semblent également bousculer nos manières de penser et produire des formes. Quels rapports entretiennent aujourd’hui l’in-formation et l’information, au sein du processus de création ?

Claire Bailly, paysagiste DPLG, urbaniste et architecte a été résidente (2015) chercheur à l'Ensci/Les Ateliers dans le cadre de la plateforme de recherche et d'expérimentations art et industrie, phénOrama. Sous la direction de Jean Magerand de la Faculté d’Urbanisme et d’Architecture de l’université de Mons – Belgique,Claire Bailly a entrepris l’écriture d’une thèse intitulée (titre provisoire) : Ville informée, forme de ville : à lecture augmentée, projet augmenté ?

La ville des données, la smart city, les Big Data, les Opendata, sont identifiés par de plus en plus d’acteurs comme des composantes importantes de la ville contemporaine et de demain. De nombreuses disciplines qui traitent indirectement ou non de la ville s’emparent de la problématique des données. Le Big Data se caractérise non seulement par une information produite et disponible en quantités massives, incommensurables, mais aussi par une information pléthorique, de qualité variable, multiforme, et généralement géolocalisée ou géolocalisable. Les données renseignent désormais sur tous les domaines de la ville et de la vie, des plus anecdotiques à ceux portant les enjeux les plus globaux. Elles sont générées en grande partie en temps réel, directement par les acteurs qu’elles concernent.

La notion même d’anecdotique tend à disparaître, puisque les anecdotes s’accumulent, se recoupent, et, une fois traitées par induction, analyse prédictive, modélisation, elles produisent de l’information utilisable. Il est dès lors intéressant d’interroger la spécificité du rapport à l’information induit par le renouveau de l’accès aux données urbaines, proposé -cristallisé ?- notamment par ce phénomène Big Data. Il s’agit, également, en retour, de tracer des pistes pour évaluer la spécificité du rapport à la ville induit par ce nouveau rapport aux données. Le travail sur la ville, qu’il s’agisse d’un travail analytique ou d’un travail de gestion ou de production, s’appuie déjà aujourd’hui sur des informations de tout type : informations statistiques de nature économique, sociale, écologique, informations juridiques sur le droit des sols, informations formelles sur la matière construite, végétale, informations techniques sur les éléments de génie urbain, etc. La ville des données dont il est de plus en plus question est-elle alors si nouvelle ?

L’outil de travail que nous avons construit pour explorer cette problématique, est le néologisme « projet augmenté » : en cherchant à élaborer une définition de cette notion, il s’agit de cerner les apports et limites de l’émergence des nouvelles formes d’information comme objets et constituants du projet.

Un groupe de recherche animé par Claire Bailly, (architecte paysagiste, doctorante phénOrama) et Armand Behar (artiste, responsable phénOrama) a été mis en place afin de définir le contenu d'un séminaire de recherche et les thèmes d’interventions. Il a été constitué de : Dominique Boullier, professeur des universités à Sciences Po, coordinateur scientifiques Médialab,François Brument, designer – Agence In-flexions, Enseignant Ensci/les ateliers,Antonella Tufano, architecte, chercheur Gerphau – ENS d’Architecture de Paris la Villette,Jérome Denis, sociologue – Maître de conférence de Telecom Paris Tech,Thierry Fournier, artiste, enseignant-chercheur Ensalab,Thierry Joliveau, géographe – Chercheur Université Jean Monnet de Saint Etienne,Manuel Zacklad, ingénieur – Professeur Cnam, directeur laboratoire Dicen. Le séminaire Ville informée, forme de ville s'est déroulé entre le mois de janvier et d’avril 2015 au studiodocumentation de l’Ensci/les ateliers. Il a fait l'objet de 5 séances : séance 1 - séance 2 - séance 3 - séance 4 - séance 5

Conurbation de Nicolas Peugnet

Dans le cadre de cette recherche Claire Bailly a animé avec Armand Behar (artiste et responsable de la plateforme phénOrama) un studio de création.

La méthodologie de recherche mise en place dans le studio de création consiste à s’appuyer sur les données produites par les instituts de statistiques pour imaginer la ville de demain. Il s’agira d’inventer des récits urbains en détournant les méthodes utilisées par les statisticiens. Récolter, traiter et analyser des données pour produire des formes poétiques.

1. Collecte de données urbaines :

Afin d’identifier les phénomènes en cours il s’agit dans un premier temps de collecter les données écologiques, géographiques, sociologiques ou historiques liées à une ville de votre choix. Ce travail d’identification s’accompagne d’une collecte d’images, de sons, de films,… qui représente et documente sur le phénomène cerné. Enregistrer, décrire, collectionner,… cette première étape s’intitule : « Cité-philie ».

2. Croisement des indicateurs pour définir des tendances :

Vient alors le temps de la « Cité-graphie », c’est à dire le temps de l’analyse des données, du traitement de l’information et de sa visualisation. Il s‘agit là de croiser les phénomènes pour créer une tendance qui puisse permettre de penser, représenter et modéliser les futurs développements urbains d’une ville. Cette analyse prédictive sert de base à la création de nouvelles cartes de villes.

3. Création d’un récits urbains à partir des prédictions :

Ces cartes servent de base à la création d’un récit ; entre prospective et science-fiction. Des récits qui renseignent, informent sur la vie des habitants de cette ville fictive à venir : son architecture, ses jardins, ses activités, ses comportements, ses usages,… Il s’agit de produire pour cette étape baptisée « Cité-logie », un livret, une « bible » qui regroupe toutes ces connaissances.

4. Définition et formalisation d’un projet de ville imaginaire :

Il s‘agit alors de créer des dessins, des maquettes, des animations 3d ou vidéo d’une architecture emblématique de votre monde imaginaire. Ces éléments serviront de base à la production d’une exposition. Un accrochage qui permettra d’aborder la question du commissariat d’exposition intégrant ainsi les notions de : scénographie, médiations culturelles, communication,…

Claire Bailly, paysagiste DPLG, urbaniste et architecte, crée son agence en 2001. Elle est enseignante titulaire à l’École d’architecture de Montpellier, chercheuse au Laboratoire EVCAU (espaces virtuels pour la conception architecturale et urbaine). Elle est détentrice d’un DEA Enjeux sociaux des technologies de la communication et prépare un doctorat en Art de bâtir et Urbanisme à l’université de Mons. Claire Bailly est cofondatrice, avec Jean Magerand, de l’Atelier international expérimental pour la cité bionumérique, structure collaborative qui explore les évolutions engendrées par le paradigme complexe et le numérique, en développant des projets expérimentaux. Elle travaille en partenariat avec d’autres institutions : Atelier international du Grand Paris (2012) ; Universcience (2013) ; Séoul Citizen Hall, Corée du Sud (2014) ; Cité des sciences (2015-2016). Claire Bailly codirige le Laboratoire expérimental en résidence à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris.

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